Je te mets ça ici:
« Je n’aurais pas dû partir de Lille » : Loïc Rémy se confie avant Marseille - LOSC
Désormais consultant pour France Télévisions, l’ancien attaquant sera aux commentaires de Marseille – Lille, mardi soir (21 h 10). L’occasion était belle de revenir sur ses deux saisons au LOSC, entre août 2018 et juin 2020…
En février 2020, vous aviez déclaré: « Je veux marquer l’histoire du LOSC. » Pensez-vous l’avoir fait ?
« Quand je suis revenu en France après mes années à l’étranger, les débuts ont été compliqués. Il fallait se réadapter à un autre championnat. Plus de cinq ans s’étaient écoulés et ça a été brutal. Quand je suis arrivé, le LOSC était dans une situation délicate. Il avait assuré son maintien in-extremis (à la 37e journée de la saison 2017-2018) et pas mal de soucis en interne (le club avait été interdit de recrutement en janvier 2018 et la DNCG était encore très vigilante l’été suivant). Forcément, j’arrive avec mon expérience, cette légitimité et je ne viens pas à Lille en pré-retraite. C’est le message que je voulais envoyer en arrivant. Je voulais montrer que je n’étais pas fini.
Si je fais un bilan de mes deux saisons, j’ai des regrets d’être parti et j’en aurais jusqu’à la fin de ma vie. Je suis revenu récemment pour les 80 ans du club et ça m’a remué pas mal de souvenirs. J’ai ce goût d’inachevé et c’est contradictoire car je suis tellement content de voir comment le LOSC évolue. C’est dans la continuité de ce que l’on a mis en place mais j’aurais aimé être acteur du projet et toujours là. J’ai été acteur du redressement du club en quelque sorte avec un groupe phénoménal pendant deux ans. On a vécu des choses incroyables même sans titre à la clé. Le club progresse sainement et c’est très positif. »
Avec 21 buts en 59 matchs (2931 minutes), vous avez marqué un but toutes les cent quarante minutes à Lille. Elle vous plait cette statistique ?
« Merci de me signaler le chiffre (il rigole) et ce qui reste, ce sont les statistiques. Je le répète. Ca n’a pas été facile. J’ai appris et je me suis fait violence. Je n’ai jamais rien lâché. Et le public l’a bien compris. Ça reflète mon état d’esprit. Même si j’ai eu peu de minutes au début, j’ai donné le meilleur de moi-même et le maximum. »
Vous aviez pourtant hésité à rejoindre le LOSC l’été 2018…
« En plus ça avait mal démarré car mon contrat n’était pas homologué pour la première journée (la DNCG avait attendu pour valider). Je m’entraînais avec le groupe mais je ne pouvais pas jouer. C’était compliqué dans tous les sens du terme. Dans le vestiaire, j’avais le sentiment d’un décalage avec la nouvelle génération et notamment du trio d’attaque Pépé-Bamba-Ikoné. Et aujourd’hui, on parle encore régulièrement ensemble. C’était la fameuse “BIP-BIP” mais moi je l’appelais le “PIB”. Ils n’ont pas compris le but de ma venue et ils me voyaient comme un ennemi ou un frein à leur progression parce que j’avais un nom et que j’allais jouer.
Donc au début c’était compliqué et il fallait parler le même langage pour apprendre à se connaître. Ensuite, ça a été du pur bonheur de travailler avec ces garçons-là. Je leur répétais sans cesse qu’il fallait travailler. Quand ils l’ont compris ça s’est super bien passé. Je me rappelle aussi d’un déplacement au Parc (2 novembre 2018, 2-1 pour le PSG) où Christophe Galtier me convoque dans son bureau pour me dire que je n’étais pas retenu. Sur le coup, ça m’a blessé car c’est un acte fort. Mais c’est l’un des moments clés de mon séjour à Lille car j’ai voulu lui montrer qu’il se trompait. »
« Avec Osimhen, c’était plus simple »
Ce n’est pas un hasard alors votre but contre Bordeaux (12 mai 2019, 1-0, élu plus beau but de l’année aux Trophées UNFP) sur une passe d’Ikoné ?
« Ce but-là n’a pas été préparé du tout. On n’a jamais fait une séquence comme ça. Il s’est fait en deux regards. J’ai eu une inspiration à un moment donné dans le match. Je vois Jonathan qui place son ballon. Je le regarde et avec les yeux je lui fais comprendre de le passer par dessus les adversaires. Il me voit mais je ne sais pas ce qu’il dit. Je dis à “Jo” Bamba de bloquer son adversaire pour que je puisse avoir un temps d’avance. Ça se fait en dix secondes. Ce petit ballon piqué, c’est un geste très difficile. L’action est limpide. Le mérite revient à tout le monde. »
Elle était dingue cette saison où vous terminez deuxièmes et ramenez le LOSC en Ligue des champions ?
« Je vais vous raconter une petite anecdote. Au début de saison, je parlais avec mes trois kinés. Et je leur dis que je leur paye un billet d’avion aller et retour à tous avec leur famille si on se qualifie en coupe d’Europe. Le LOSC vient de passer une saison catastrophique en frôlant la relégation. Je fais ça pour qu’on soit sur un “mood” positif. Et on se tape dans la main. Lors de la dernière journée tout est acté et on est en Ligue des champions. Je pensais qu’ils avaient oublié mais pas du tout. Je ne disais rien et j’arrive en salle de soins quand l’un des trois me demande la date du départ pour les Antilles. Chose promise chose due et ils m’ont tous envoyé des photos de leurs vacances. Il y avait une ambiance incroyable. »
Lors de la deuxième saison, malgré quelques pépins physiques, vous jouez plus et cette fois avec Victor Osimhen…
« Lors de ma première année, il y avait aussi Rafael Leao. Ce n’était pas le Leao d’aujourd’hui pour différentes raisons. Il était déjà pétri de talent mais n’avait pas encore compris l’implication qu’il devait mettre dans son métier. Maintenant il l’a compris. Et derrière, j’ai dû me réadapter avec un autre type de profil. Mais Osimhen c’était plus simple. Il pèse sur une défense, il ne lâche rien et court 90 minutes. Et pour moi qui était déjà plus entamé physiquement, il attirait les défenseurs et me libérait des espaces. On a réussi à trouver une entente. C’était aussi un plaisir de jouer avec lui. »
Partir de Lille, « un moment très dur »
Le 8 mars 2020, vous marquez contre Lyon (1-0). Vous ne le savez pas encore, ce sera votre dernier but et votre dernier match avec les Dogues…
« Je me rappelle très bien de cette soirée. Je dis toujours aux plus jeunes de profiter de chaque instant, de chaque entraînement, de chaque odeur de vestiaire. On répond oui par politesse, mais bon. Ce soir-là, jamais je ne pense que c’est mon dernier but avec le LOSC sinon j’aurais enchaîné les tours de stade. Vient alors le temps des regrets car je n’aurais pas dû partir. On n’a pas trouvé de terrain d’entente. J’ai mis du temps à l’accepter. En tout cas, en termes de plaisir, Lille représente les deux plus belles années de ma carrière. »
Pourquoi n’avez-vous pas effectué une troisième saison à Lille ?
« C’était très confus. On était d’accord pour continuer mais il y avait un désaccord au niveau d’une prime. Je devais en toucher une si le LOSC se qualifiait en coupe d’Europe. Au moment de renégocier, Marc Ingla (directeur général) parle à mon agent et lui dit qu’à mon âge, je ne trouverai pas mieux. Elle l’a pris comme un affront et elle a cherché d’autres pistes. Elle a trouvé un club italien qui me triplait mon salaire. C’est dommage, pour une histoire de primes ça s’est terminé alors que j’étais super bien. Ça a trainé et j’ai décidé de partir. Je n’ai pas compris pourquoi ça trainait. José Fonte est venu me voir, le coach aussi. Quand j’arrive au club pour dire au-revoir à tout le monde, c’est un moment très dur. La vie a continué et le LOSC a trouvé mon remplaçant avec Burak (Yilmaz). »
Un an plus tard, le LOSC est champion de France. Comment le vivez-vous ?
« Je suis super content car je vois un club qui n’a rien volé à personne. Lille a été performant toute la saison. Je me souviens très bien de la soirée. J’appelle Benjamin André. Un an avant, il m’avait dit de rester car on avait un bon groupe, qu’ailleurs j’allais me faire chier. Je lui avais expliqué la situation et il avait compris ma décision. Et là je l’ai au téléphone et je lui dis qu’il avait raison, que j’aurais du rester. Je ne suis pas devin, je ne pouvais pas prévoir qu’il avait raison. »
« Tous les ingrédients pour un grand match »
C’est une surprise de vous voir devenir consultant. Vous n’étiez pas un fan des zones mixtes et des conférences de presse lors de votre passage à Lille...
« Pour être honnête, j’avais beaucoup de mal avec la presse. J’ai lu des articles sur moi avec des choses fausses et donc j’avais beaucoup de mal avec ça. Je pensais d’abord à me protéger et protéger ma famille. Je voulais rester en retrait et ne pas parler de moi. Ça m’a fait du bien car je rentrais dans une routine avec mes proches. Je suis retombé dans cette normalité et ça me correspond. Je voulais me préserver et maintenant je me retrouve consultant à France Télévisions. Ils m’ont appelé en me demandant si ça m’intéressait de commenter les matchs. En toute transparence, je leur réponds que je ne regarde pas du tout les matchs. Alors, on a réalisé un commentaire sur un match de Ligue des champions à blanc. On a mis nos voix dessus et j’y prends du plaisir. »
Alors quel est votre avis sur le Marseille de De Zerbi et le Lille de Bruno Genesio ?
« Dans ce que je fais, j’aime rester impartial. Avec De Zerbi, Marseille a trouvé une certain équilibre. Il y a une pression dans ce club-là et ce que propose l’OM est cohérent. Il faut voir comment il va gérer cette seconde partie de saison. En tout cas, c’est une équipe agréable à regarder. En face, Lille est solide avec des joueurs comme Zhegrova, Cabella et David. Ils ont les moyens d’aller titiller Marseille. C’est en tout cas une superbe affiche à commenter. Il y a tous les ingrédients pour un grand match. »