LOSC - Ludovic Obraniak: «Cette année-là, on avait tout»
Publié le 21/04/2016
PAR ANTOINE PLACER
Buteur décisif lors de la finale de la Coupe de France face au PSG au Stade de France (0-1), Ludovic Obraniak (31 ans) n’a rien oublié d’une période bénie sur les plans collectif et individuel. Désormais en Israël, au Maccabi Haïfa, il a accepté de revenir sur cette année faste, mais a également évoqué la finale de samedi et son quotidien loin de nos frontières, désormais. Dialogue impeccable avec un trentenaire accompli et bien dans ses baskets, qui sait d’où il vient et où il va. Ludovic Obraniak, dans les bras de Marc Cuvelier, l’un des kinés toujours au club, et de son grand pote Franck Béria. PHOTO ARCHIVES PATRICK JAMES VDN Bonjour Ludovic, d’abord, comment allez-vous ? « Là, tout de suite ? Honnêtement, je suis un peu fatigué, on a joué hier (mercredi) soir, c’était la Coupe, et nous aussi on est en finale ! (son équipe s’est imposée chez le leader du championnat, Beer Sheva, sur le score de 3-1, et affrontera en finale le vainqueur de Sakhnin – Maccabi Tel-Aviv, ndlr). J’ai trouvé en Israël une très belle qualité de vie. Tel-Aviv, c’est Miami, il n’a jamais fait en dessous de 15 degrés… C’est une super ville, moderne, dynamique, avec une super école française pour mes enfants. On fait une saison moyenne en championnat, on devrait finir 4e, mais on est en finale, ça compense ».
Vous êtes devenu un vrai baroudeur. Après l’Allemagne, la Turquie, Israël… « C’est ce que je voulais. Je suis content des choix que j’ai faits. À partir du moment où tu sais que tu ne joueras pas la finale de la Ligue des champions… J’ai fait 400 matchs de L1, j’ai gagné des titres, je voulais voir du pays. En Allemagne, au final, ça ne me correspondait pas. Il y a un trop gros déséquilibre entre le Bayern, Dortmund, quelques clubs et les autres, qui misent tout sur l’attaque sans véritable dimension tactique. En venant de la L1, je me suis dispersé à vouloir compenser sur le terrain des trucs qui me paraissaient aberrants et je ne me suis pas mis en avant… Et puis au Werder (Bremen) on m’avait promis un rôle de 10, axial, et je me suis retrouvé à jouer à gauche, dans un 4-4-2. Le coach ne m’attendait pas spécialement alors que les mecs m’avaient sans doute longtemps supervisé… »
Ensuite, direction la Turquie, à Rizespor, un club assez exotique vu de France… « La Turquie, c’était top. J’ai vraiment aimé, je me suis éclaté, dans une équipe faite pour moi, avec un coach exceptionnel (Hikmet Karaman), un fou furieux, dans la lignée d’un (Fatih) Terim… Ce mec-là m’a remis d’aplomb. Il m’a dit : « Pendant trois semaines tu vas me détester, et après on va s’éclater… » J’ai bossé comme rarement, comme je ne l’avais pas fait depuis la France, et après ça n’a été que du bonheur ! Le seul souci, c’était l’environnement, c’était juste pas possible. Pour la famille, c’était difficile : on était déjà dans une ville moyenne, et à une heure à gauche, il n’y avait rien, et à une heure à droite, il n’y avait rien non plus (rires). Peu de gens parlaient anglais... En Israël, on est vraiment bien. J’ai un contrat de deux ans, on verra cet été, on fera le point. Je me verrais bien rester. »
Et plus tard ? « Finalement, je me vois bien passer mes diplômes d’entraîneur, ce que je n’evisageais pas avant. Mais pour l’instant, je veux continuer à jouer, et peut-être découvrir d’autres univers avant de raccrocher, comme les USA, l’Australie ou le Japon... »
Cette finale de Coupe de la Ligue, pour Lille, en rappelle une autre, en 2011, face au PSG déjà, avec pour unique buteur… un certain Obraniak. Quels souvenirs gardez-vous de tout ça ? « C’est la période où je me suis le plus épanoui professionnellement. Je suis devenu papa le soir où on est sacrés champions, au Parc (2-2, il avait signé l’ouverture du score, ndlr), une semaine après avoir marqué ce but sur coup franc en finale de la Coupe… Franchement, cette période, c’est l’épanouissement et l’aboutissement d’un collectif, d’un groupe. Cette année-là, on avait tout. La base était ensemble depuis quelques années, et on avait eu des renforts de poids avec les Sow ou Gervinho, qui amenaient un vrai plus… Il y avait une osmose incroyable, à tous les niveaux, même si l’atmosphère de la victoire aide, il faut en avoir conscience. Il y avait de l’homogénéité jusque dans les caractères, avec les sages Frau ou Balmont, les plus fous comme Rami ou Chedjou, les jeunes… C’était une année exceptionnelle, je ne me suis jamais autant éclaté ! »
Et donc, il y a ce but, en finale de Coupe de France, où vous faites basculer seul le sort du match… « Ce but, je dois l’avouer, c’est un vrai moment de plaisir, très égoïste, même pour moi qui fait toujours passer le collectif devant. Je sortais d’une saison où j’avais joué moins que ce que j’espérais. Et vous vous souvenez de mon caractère (sourire)… Ce but, je l’ai pris comme une récompense, parce que toute l’année, malgré ma frustration, j’avais pris sur moi. »
https://www.youtube.com/watch?v=EKjjKDeX3IsLes liens qui existent avec cette génération de joueurs doivent être très forts, non ? « Même si on s’est un peu dispersés, bien sûr ! Je crois que l’envie est là de tous se revoir, de créer quelque chose à terme. Rio (Mavuba) le fait un peu grâce aux Orphelins de Makala, même si c’est difficile de tous pouvoir être là. Mais dans le futur, je sais que quelque chose se fera, par rapport à ces moments-là, on aura besoin d’en reparler, d’en profiter encore. Ça a été fort entre nous ».
Lille, même s’il n’accomplit pas le même genre de saison, se retrouve lui aussi en finale, lui aussi contre le PSG… « L’adversaire n’est plus vraiment le même… Les Lillois, je les vois jouer depuis le début de la saison, je sens une grosse force de caractère. A chaque fois qu’ils sont mal, qu’ils sont au bord du précipice, il se passe un truc, positif. Ils ont aussi un coach qui a compris comment fonctionnait ce groupe, je sens qu’il va nous préparer un truc pour cette finale. Après, ça peut aussi se jouer sur la forme de Paris, dans quel état d’esprit les joueurs parisiens vont être, après leur élimination en C1… Il y a un coup à jouer, c’est sûr, même si ce sera compliqué. Il va falloir les bousculer, être à 100 % dans l’impact physique. Rio (Mavuba), Flo (Balmont), Renato (Civelli), même suspendu, vont être importants dans l’approche de ce match. »
Ça peut basculer sur quoi ? Un coup franc ? « (Sourire) Il faut qu’ils restent sur ce qu’ils font en ce moment. Il ne faut pas revenir à quelque chose de plus égoïste ce jour-là, sinon… Je suis admiratif de ce que fait Boufal, il me rappelle quelqu’un d’ailleurs (Hazard, ndlr), mais il faut qu’il reste dans l’attitude qu’il a en ce moment. S’il fait ça, le collectif va le lui rendre. Il faut vouloir briller à travers le collectif, pas tout seul. Eder, c’est une bonne pioche, je pense qu’il peut embêter les deux Golgoths brésiliens… Et Amalfitano amène vraiment quelque chose, techniquement. Je le redis, il y a un coup à jouer, je vois des signes encourageants. Pas sur une saison, mais sur un match… »
Vous serez présent ? « J’aurais adoré, mais on a un match important ce week-end, je ne pourrais pas me le permettre. Mais je serai devant ma télé, derrière eux. »
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